Engagé sur la féminisation de son conseil d’administration depuis 20 ans, Jérôme Calleau, président de la CAVAC et d’InVivo, a profité de ses différents mandats pour mettre en place des mesures afin que les femmes aient davantage accès à des postes à responsabilité dans le secteur agricole. Un travail de longue haleine qu’il mène avec persévérance et conviction, à l’heure où encore trop peu de femmes sont représentées dans les conseils d’administration et les coopératives. Pour en savoir plus sur les leviers qu’il a actionné dans sa politique de mixité, nous l’avons rencontré.
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Pouvez-vous vous présenter et présenter votre coopérative, la CAVAC ?
Je suis agriculteur en Vendée dans une exploitation en polyculture élevage, et administrateur depuis 1992 de la coopérative CAVAC, dont je suis devenu président en 2000.
La CAVAC est une coopérative polyvalente située en Vendée et dans les Deux-Sèvres. Nous avons 6 organisations de producteurs dans le domaine des productions animales, l’activité nutrition, une importante activité de collecte et d’approvisionnement en céréales ainsi qu’une forte diversification dont une activité en jardineries. Nous avons également quelques petites industries agro alimentaires en prolongement des productions de nos adhérents, telles que du pain bio, du porc bio, des quiches et crêpes surgelées…
Au sein de la CAVAC, quelles sont les actions que vous avez mises en place pour plus d’égalité ?
J’ai souhaité agir dès mon arrivée à la présidence de la CAVAC en 2000. À l’époque il n’y avait qu’une seule femme dans le conseil d’administration ! Je trouvais cela injuste que sur 30 administrateurs il n’y ait qu’une seule femme. Avec l’aide de cette administratrice, j’ai mis en place différentes actions. Nous avons réuni plusieurs femmes pour échanger et comprendre les écueils qui pouvaient les tenir éloignées des instances dirigeantes, ce qui nous a permis de créer un certains nombre de mesures : écrire “Monsieur, Madame” sur les invitations et plus seulement “Monsieur” ; organiser des journées dédiées pour leur faire découvrir la coopérative et ses fonctions ; choisir des horaires de réunion en journée plutôt que le soir… Sur le sujet des horaires, on a remarqué que même les hommes en étaient satisfaits : aujourd’hui nous n’avons plus de réunion le soir, et cela permet à tous d’avoir la soirée libre !
Pour attirer les femmes dans les fonctions coopératives, il faut savoir s’entourer d’autres femmes, qui vont pouvoir aider à recruter. Lorsque j’ai rencontré Lucie Mainard, j’ai tout de suite vu qu’elle avait des qualités d’animatrice. J’ai donc proposé à son mari qu’il lui laisse sa place au sein du conseil d’administration : il faut être proactif et demander aux hommes de laisser leur place ! Je lui ai ensuite donné carte blanche sur un plan d’action visant à faire connaître et donner l’accès aux femmes au conseil d’administration mais aussi aux premières instances avec les postes de déléguées de section. J’ai donc laissé à Lucie la possibilité d’agir et elle a mis en place le groupe Les Bottées, qui permet aux femmes de découvrir la coopérative.
Je me suis également impliqué personnellement afin que davantage de femmes soient élues dans les sections, car c’est la première étape avant de pouvoir entrer au conseil d’administration. Comme cela a été le cas pour Lucie, je suis allée les rencontrer en leur proposant les postes à pourvoir. J’ai renouvelé cette démarche quelques fois pour donner la possibilité aux femmes de s’investir dans la coopérative et leur montrer qu’elles ont les compétences pour le faire.
J’aborde également le sujet de la féminisation chaque année lors du renouvellement du conseil d’administration. Je demande à mes collègues qu’ils s’adressent en premier aux femmes quand ils cherchent de nouveaux délégués. Une coopérative est une entreprise économique, on cherche les facteurs clef de succès : pour moi, avoir des femmes au conseil d’administration est un facteur clef de succès !
On voit que l’agriculture fait face à des difficultés de recrutement et de renouvellement des générations, pensez-vous qu’attirer des femmes dans le secteur pourrait être une réponse à ces enjeux ?
Ce n’est pas la seule réponse effectivement mais il est certain aujourd’hui que le secteur peut attirer les femmes, on le voit dans les écoles, le nombre de femmes impliquées dans des formation agricoles est assez important, c’est à nous ensuite de les accompagner pour qu’elles puissent être présentes dans les instances dirigeantes et à des postes à responsabilité.
On voit beaucoup de reconversions de femmes qui ont un parcours classique dans des entreprises d’autres secteurs et qui souhaitent s’installer en agriculture, c’est un vivier de renouvellement qu’il faut exploiter autant que possible et leur offrir la possibilité de s’engager.
Vous êtes également président d’InVivo, est-ce que les leviers pour rendre les femmes plus visibles sont les mêmes que dans une coopérative ?
Concernant les femmes élues au conseil d’administration, l’écueil auquel nous sommes confrontés c’est que nous ne pouvons pas choisir les représentants des coopératives élues au conseil d’administration. La coopérative élue au conseil choisit elle-même son ou sa représentante. Souvent c’est le président ou le directeur. Les présidentes de coopératives sont très rares, c’est donc difficile de pouvoir les amener jusqu’au conseil d'administration.
Néanmoins nous communiquons autour de ce sujet, nous nous en faisons le relai. Tous mes collègues connaissent cette problématique et sont conscients de l’enjeu de la féminisation de nos fonctions. Ici j’agis davantage de manière indirecte, en échangeant avec les différents acteurs du secteur.
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